Saynète n° 122
Il est phtisique : avec un visage jaune et creusé. Seul le bout de son nez, semé de quelques boutons, est violacé. Il porte des lunettes, et il semblerait que de la cendre lui tombe dans les yeux. Il marche à pas longs et rigides ; avançant un pied, il fait bouger l’épaule correspondante.
Elle a honte de se parer d’une rose ! Ses gants froissés et tout troués, une jupe qui lui reste entre les jambes, un chapeau qui avait été à la mode dix ans auparavant, des chaussures à talons tordus.
Ils firent connaissance dans une brasserie, près d’une promenade publique, un dimanche : des petites tables de pierre, rondes, des tabourets de fer peint, un petit orchestre jouant faux, dirigé par un chef chauve.
Ils se marièrent.
Ils ne sortent presque jamais ensemble ; et un sale petit clébard bâtard, pelé et ratatiné, lui emboîte le pas, qui s’arrête tous les trente mètres afin de ne pas tomber sur ses pattes arrière.
Federigo Tozzi, Les Bêtes, traduit de l’italien par Philippe Di Meo, Paris, Éditions Corti, 2012, pp. 17-18.
08/05/2021
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