Abécédaire

 

 
Optimisme n°2
 
 


Virginie Huguenin

02/04/2016

Optimisme, je ferme les yeux. Car il est vrai que ce que je vois brûle ma rétine, que ce que j’entends obstrue mes oreilles. Plus rien ne passe mais pas toujours, la force de ce que l’on se donne me donne à rêver.

Je suis avec toi dans ce train, assise, et face à nous les gens sont tristes et fatigués. Mais je sais que là où je vais, j’entendrai des cris vivants d’émotions mal contenues, d’émotions tristes ou joyeuses, d’émotions c'est tout ce qui compte. Je t’emmène avec moi, écoute.

Amel, en cinquième, hurle dans les couloirs. Elle hurle parce qu'elle est amoureuse d'un garçon mais ne sait pas comment le lui dire. En classe, un autre garçon la regarde et pour attirer son attention, donne des coups dans sa chaise. Elle rouspète encore plus fort. Adem est en retard et franchit la porte sur la sonnerie, un sourire aux lèvres. Un sourire de défi plein de son cri d'adolescent révolté. Je le laisse entrer et s'installer nonchalamment sur sa chaise, en le regardant d'un air entendu. Je lui souris, il se redresse. Le cours peut commencer. A l'heure suivante, Aminata pleure dans mes bras « car [elle a] peur d'échouer ». Emue, je lui confie que j'ai raté deux fois l'agrégation et que sans cela, je ne l'aurais probablement jamais rencontrée, tenue dans mes bras et réconfortée. Maigre consolation pour l'une ? Pour l'autre ? Non. Car elle m'écrira : « Merci Madame ».

Le bruit imperceptible de l’optimisme hurle dans les couloirs. Il est là, dans ce terreau de bruits, de gestes et de paroles confus et beaux, d'émotions contemplées, partagées, vécues intensément à plusieurs jusqu'aux larmes. A portée de main, des yeux et de la voix. Alors, saisissons-nous en !

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