Abécédaire

 

 
Mutation
 
 


Mathilde Faugère

05/03/2016

1- La cellule du corps humain mute.

2- La société, comme corps, mute.

Parce que les deux se mêlent pour nous, parce que le langage a muté, parce que l’histoire naturelle du XVIIIème a emprunté ce mot au social, parce que la société a été pensée comme un corps, et que notre esprit est aujourd’hui plein de « mutations génétiques » et consorts, la mutation, métaphore non-métaphorique, nous amène en terrain glissant sans même que nous le sachions. Là, tout est connecté, tout est cellule, organe, organisme et totalité. À la cellule du corps vivant, répond aussi bien la bactérie partie d’un éco-système que la consonne dans la langue, la note dans une pièce pour orgue, un groupe social dans la société toute entière. Tous mutent. Et il n’est pas si aisé de distinguer les différents sens : la mutation comme mouvement du même, la mutation comme transformation dans le temps, la mutation malformation, la mutation choisie, inconsciente, forcée.

De là tout se mêle. En reste une impression : la mutation, subie par la cellule/la société/la langue, est alors changement tout à la fois profond, non maitrisé, souvent invisible. On n’en connaît pas la cause, ou du moins on ne peut l’arrêter, l’influencer, seulement l’observer au microscope. Ce qui advient : l’entité ne se reconnaît plus. Nouveauté monstrueuse contre laquelle il faut lutter pour conserver une intégrité ? Évolution naturelle et nécessaire, à encourager, pour survivre ? « Il faut que tout change pour que rien ne change » ? Il faut que tout change tout court ?

Ça devient vite anxiogène : on ne peut s’extraire, on est pris dans le corps, dans un organisme ou un autre. On en vient vite à penser en terme de nécessité, d’absence de choix. Le mutant n’est pas loin, le scénario catastrophe non plus.

Appel à la rébellion des cellules. Devenir mutant soi-même pour tenter de muter dans le bon sens ? Se revendiquer freak ?

Peut-être aussi, simplement, finissons-en avec la mutation, pensons changement, variation, déplacement, ou même transmutation. Sortons de la place de la cellule, par pitié. Ménageons-nous du choix.

 

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