Exergue n° 64
« L’expérience est en ce sens fêlure, non-savoir, épreuve de l’inconnu, absence de projet, errance dans la ténèbre. Elle est l’impouvoir par excellence, notamment par rapport au règne et à sa gloire. »
Georges Didi-Huberman, Survivance des Lucioles,
Paris, Minuit, 2009, p. 123.
Brice Tabeling
26/01/2013
Georges Didi-Huberman ajoutera, commentant Bataille, que l’expérience est aussi une puissance « d’un tout autre ordre », une « puissance de contestation ». Mais peu importe si ce qu’il s’agit d’abord d’y reconnaître est une faiblesse constitutive et de là, d’entendre le désarroi inévitable de celui qui, « dans la ténèbre », la vit et tente de la transmettre.
Prenons, un peu contre l’auteur, le parti de l’intemporalité de ce désarroi. Jamais il n’y eut d’expérience qui ne fût obscure : traverse du sujet par l’inconnu, rencontre à laquelle rien ne prépare. Comment faire remonter alors cet éclat de nuit qu’éblouissent les lumières du temps présent (images des médias de masse, clarté des langages efficaces de la puissance) ?
L’impouvoir de l’expérience appelle un pouvoir de remontée : c’est une image, un conte, un poème, un roman. C’est une langue attentive à la ténèbre et qui lui fait prudemment passage.