Abécédaire
Hélène Merlin-Kajman
25/04/2015
Le bouton promet la fleur et la fleur le fruit.
Il y a des années sans fruit, mais les fruits reviennent.
* * *
Promets-moi.
Je te le promets.
N’oublie pas : dire, c’est faire. J’acte ta promesse, je compte sur ta parole.
Mais comme ta phrase est pressante ! Un performatif elle aussi. Sais-tu seulement à quoi tu m’engages ?
J’ai besoin d’air.
J’ai besoin d’air.
Traître, tu n’as pas tenu ta promesse.
Ce n’était pas un serment.
Mais quelle différence fais-tu entre une promesse et un serment ?
Le serment engage les morts, les dieux, l’honneur. Pas la promesse, toujours naissante.
Et puis après ? Je t’avais fait confiance.
Tu avais raison. Mais je ne savais pas à quoi je m’engageais. Tu peux toujours me faire confiance.
Alors que tu n’as pas tenu ta promesse ?
C’est faux ! Je l’ai tenue. Mais le vent est passé par là, qui l’a effacée...
C’est faux, je l’ai tenue ! Ne le sais-tu pas ? Quelle preuve te faut-il donc ? Ma parole ne te suffit-elle pas ?
* * *
La promesse court de lèvres en lèvres, comme le furet.
* * *
Et que peut-elle promettre sinon elle-même ?
Je n’entends pas dire qu’elle est un mot spéculaire, ni un leurre, ni un piège. Au contraire. Prise dans la nuit des temps, elle est appel fervent et réponse incertaine. Elle est le pas qui s’approche, les doigts qui caressent, la brise dans le feuillage, le frémissement de l’aube, le mouvement des étoiles et la roue de la fortune ou encore, venu du large, l’iode marin qui excite la narine, le piétinement impatient du cheval...
Elle est le sens de la justice qui toujours se dérobe, l’anticipation de ce qui ne peut l’être, l’imprudence au pays de la prudence...
La promesse n’a pas peur des trébuchements. Qu’elle parle, et tout redevient possible. Elle est accueil, elle est relève, elle est élan...