Abécédaire
Sarah Nancy
15/11/2014
Instrument à percussion. Il faut, pour qu’elle sonne, deux éléments : un contenant – sorte de coupe renversée, de sphère ouverte –, et ce qui vient cogner contre lui – à l’intérieur, accroché, un battant, ou parfois, à l’extérieur, un marteau. Tirant son son d’elle-même, elle est dite idiophone. Solennité de l’airain, moirure râpeuse du cuivre, désarmante limpidité du verre. En haut des tours, au cou des vaches, dans la fosse d’orchestre ou sur la mer agitée, des musiques de matière, et des prénoms qui tournoient : Emmanuel, Big Ben, Berenguela.
Par analogie de forme, la cloche aide à nommer une fleur, une courbe, une jupe, ainsi que toute une série d’appareils et d’objets qui servent à protéger, recouvrir, abriter. C’est utile et sans doute agréable d’être au-dessous. Attention toutefois à ne pas oublier que la cloche vit de choc, d’espace et de mouvement. C’est par mer, avec des moines irlandais, que le mot « clocca » (bas latin) est arrivé sur le continent ! Sans le battant, sans le marteau, risque de figement et d’asphyxie.
Rien de tel quand, par métaphore, la cloche désigne la tête. Elle est souvent fêlée. Et prête son monosyllabe ouvert et rondouillard à l’expression du ridicule : « Qu’est-ce que je suis cloche ! », ou du boitement logique : « ça cloche ».
« Ca cloche » – irritant ou libérateur ? Irritants ou libérateurs le balancement imprécis et obstiné, l’harmonie approximative de l’ensemble, l’idée qui ne tourne pas rond ?