Abécédaire
Hélène Merlin-Kajman
16/12/2017
L’errance est un mot qui égare.
Rien de bien étonnant à cela : de l’errance à l’égarement, il n'y a qu’un pas.
Mais s’il égare, c’est qu’il ne semble pas gagner à être défini.
Évidemment, en ouvrant un dictionnaire, on trouverait sa définition.
Mais voilà, l’idée de sa définition trouble mon désir d’en parler.
L’errance malmène l’idée d’abécédaire. C’est un mot destiné à s’évaporer face au sable, au sel d’un désert, au ciel trop large infiniment ouvert, à la route infinie ou à la mer des tribulations malheureuses, au dédale des rues, au gris de l’asphalte et des trottoirs, aux pas hésitants, exténués même, d’une silhouette familière que chacun porte en soi et reconnaît, dont on a une expérience intime ou qu’on redoute, qu’on rejette, qu’on envie ou qu’on plaint.
C’est un mot rapidement exténué, désolé, esseulé, évanouissant...
Et pourtant, l’errance, c’est aussi un mouvement, presque un élan ! Avec son idée, avec son vague, vient l’envie de flâner, de vagabonder, de contourner, de s’éloigner, d’entr’apercevoir, de s’évader, et même de fuir, peut-être...
De revenir aussi, plutôt que s’égarer...
Mais revenir où ?
(Au cœur de moi quelque chose défaille).