Sablier n° 3. 2.

 

Etrangetés et solitudes n°2
 


Tristan Bourhis

04/04/2020

« Nouveau » ? Depuis bientôt deux semaines, ce terme a perdu son sens.

« Nouveau » ne convient pas. « Monotonie » ou « répétitif » oui, cela convient bien mieux.

Se lever et se coucher à pas d’heure. Ne pas faire attention au temps. Ne pas savoir quel jour sous sommes. Se perdre dans le temps, dans ce flux de minutes à rallonge, dans cette monotonie. Tout se ressemble, rien de nouveau. Il n’y a pas de « nouveau » en ces jours.

Se lever sans réveil, faire son café, fumer dans le jardin.

Lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi et dimanche. Quel jour on est ?

Se repérer par la météo « Le jour où il faisait gris » ou « Le jour où il faisait froid » ou « Le jour où il y avait du soleil. » Nous sommes à trois jours de soleil au vent frais.

Se pencher sur un puzzle, La Nuit étoilée de Van Gogh.

De 14h à 16h ? De 8h à 11h ? Pendant combien de temps ? À quelle heure ?

Je ne sais plus. Il fait nuit dans le tableau de Van Gogh, il fait peut-être nuit chez nous.

Faire un puzzle, assembler des pièces qui se ressemblent. Trier et se perdre à nouveau.

Retourner fumer. La seconde clope, la troisième, la énième, je ne sais pas. Le cendrier est plein. On ne compte plus depuis ces jours. Quelle heure est-il ? Quel jour sommes-nous ? Combien de cigarettes j’ai fumées ? Je ne sais pas. Le calendrier s’est brisé, les jours en sont tombés. J’assemble les pièces du puzzle, ou les jours sur le calendrier.

Mardi vient avant dimanche ou après jeudi ?

Lire, écrire, lire et écrire. Encore. Lire et réécrire. Lire et écrire des mails. Le contenu ne compte pas, tant qu’on lit et on écrit. Mails, livres, cours et notices en tout genre. Ce ne sont que des mots. Ecrire des mails, des textes, des histoires et des mémoires.

Errer dans la maison, errer dans le jardin, se surprendre à choisir ce pouf, cette chaise, ce sol pour s'asseoir. Ouvrir un livre, à quelle page ? Je ne sais pas, je ne compte pas. Quel livre ? Celui qui a la couverture noire. Quelle page ? A toi de me le dire, marque page. Moi je ne compte plus.

Se poser sur le canapé gris avec une tisane chaude « Nuit tranquille ». C’est qu’il fait nuit alors.

La Nuit étoilée de Van Gogh, tisane « Nuit tranquille ». Il fait nuit. Je dois aller me coucher.

À quelle heure ? J’ai dit que je ne comptais plus, ou que je ne contais plus.

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