Exergue n° 26

 

« Les impressionnants bâtiments de la certitude définitive, nous n’en manquons pas, cessons d’en construire. […] Nous devons conserver au centre de notre monde le lieu de nos incertitudes, le lieu de notre fragilité, de nos difficultés à dire et à entendre. Nous devons rester hésitants et résister ainsi, dans l’hésitation, aux discours violents ou aimables des péremptoires professionnels, des logiques économistes, les conseilleurs-payeurs, utilitaires immédiats, les habiles et les malins, nos consensuels seigneurs. »

Jean-Luc Lagarce, « Nous devons préserver les lieux de la création »,
Du luxe et de l’impuissance, Les Solitaires intempestifs, 2008, p. 17.

 
 



Linda Fares

10/03/2012

Hésiter ou ouvrir le champ d’un inconfort heureux, celui d’une non-coïncidence entre l’être et ses mots. Aux formules définitives, préconstruites et creuses, préférer un discours qui déraille, une phrase qui s’énonce dans la nostalgie des possibles qu’elle aurait pu ouvrir (et qu’elle esquisse par là même), une parole nomade qui porte une quête indéfiniment renouvelée de sa pensée.

Cesser de sacraliser l’exposition nette et faussement rassurante pour inciter au bégaiement qui n’est pas une tare mais un art, un mode d’expression profondément éthique en ce qu’il dessine une manière d’être au texte et au monde.

Bégayer ou (se) frayer un passage à coups d’infimes déplacements. Persévérer dans cet espace de transition pour espérer continuer à être, ne plus le voir comme le lieu (qui ne vaut qu’en tant qu’intermédiaire) où va se jouer un choix mais comme l’atopos où se déploie un jeu salvateur sur le langage.

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