Hélène Merlin-Kajman

26 mai 2012

 

 

La grâce, encore

 

Avions-nous vraiment conscience, en proposant une réflexion sur la beauté (littéraire), que la beauté, en tout cas celle dont nous ressentons aujourd’hui le besoin, passait décidément par la « grâce », charme et douceur partagés, comme d’autres articles nous l’ont déjà suggéré ?

Cette semaine, cette grâce est partout : dans l’exergue écrit par Virginie Huguenin sur une citation de Barthes commentant lui-même la lecture faite par Freud de la Gradiva de Jensen ; dans l’article de Nathalie Dauvois qui, en nous présentant la célèbre phrase d’Horace, « Il ne suffit pas que les oeuvres soient belles, il faut qu’elles soient émouvantes », rouvre le dossier du rapport entre éthique et esthétique, ce dossier que la modernité avait cru pouvoir refermer ; dans la réponse au questionnaire de Quentin Leprevost, pour qui lire est « comme élan vers les autres » ; et enfin, dans le roman de Santiago Amigorena, 1978, qui nous a réunis le  6 juin 2011, et qui en est entièrement tissé.

Mais attention ! La grâce, et la couleur, comme ce dernier nous le rappelle, ce n’est pas la fadeur ni la niaiserie, ce n’est pas l’opium des peuples ! La discussion avec Santiago Amigorena prouve que si la grâce écarte les discordances comme le voulait Horace (Nathalie Dauvois), elle n'étouffe pas les désaccords, les frémissements ; et que l’érotique des échanges littéraires a des enjeux politiques, ou quasi-politiques (car on peut discuter du sens de ces termes, vous le verrez).