Hélène Merlin-Kajman

 


11 Mai 2020

 

 

11 mai 2020

Ce n’est sans doute pas une date historique, en tout cas pas comme celle du (premier ?) confinement. Ce qui me frappe plutôt, c’est l’effet de cette durée. Je ne parle pas de ses effets tragiques sur tant de vies en raison des situations extrêmes et inattendues qu’elles ont eu à subir. Je ne parle pas non plus de l’isolement et des étrangetés qu’il génère (et que notre sablier a essayé de mettre en mots). Je parle de ce choc fulgurant (du moins, j’imagine, dans les consciences occidentales de ceux qui ont eu le loisir de se pencher sur leur conscience), entre le très vieux et le très nouveau : un choc que nous avons eu le temps de méditer et de mesurer (mais sûrement pas de digérer - heureusement)...

Pour m’en tenir au plan anthropologique, jamais l’humanité n’avait vécu le tempo et la brutalité d’une pandémie avec autant de connaissances scientifiques, et tous les moyens qui accompagnent ces connaissances, mais avec un tel manque des moyens qu’il aurait fallu mobiliser aussitôt pour pouvoir encaisser ce choc : ce choc entre le tempo à l’ancienne d’une contagion, et cet état du progrès.

Comment, dès lors, ne pas être angoissés face au déconfinement ? Nous ne sortons pas du confinement comme nous y sommes entrés : et pourtant, l’épidémie a un peu diminué. Mais entre temps, dans cette durée, il s’est passé que nous y croyons maintenant. Il me semble que ce décalage aussi, qui inverse l’état de la réalité et l’état de nos peurs, est étrange, nous rend étranges à nous-même.

Le sablier à fleur de peau d’Augustin Leroy résume bien mieux que moi ce déchirement que peut nous causer la perspective du déconfinement. Nos sabliers ont parcouru des paradoxes. Ceux de cette semaine en poursuivent l’exploration : Virginie Huguenin, avec ce qu’elle voit par la fenêtre, et sa « vie de famille » vue du lieu du confinement ; Jean Giot, avec une méditation sur les gestes ; Guido Furci, avec un tableau fugué d’une autre « vie de famille » ; et l’anthropologue James Siegel, dont Transitions, il y a longtemps, avait publié la traduction de deux textes (ici, et ici), photographie avec une incroyable précision, en quelques lignes, ce qu’il observe dans son quartier de la République quand il sort…

Quant aux adages, Augustin Leroy et moi-même nous sommes demandé ce qu’on peut faire de la calvitie d’une occasion…

La prochaine livraison aura lieu le 6 juin.

Nous continuerons le sablier, avec comme prochain thème, « le masque ».

Mais nous poursuivrons les précédents.

H.M.-K.

 

Nous attendons vos textes.

 

Prochain sablier : « Le masque »

Prochaine saynète : un texte de Simenon.

Prochain adage  : « Quand on n'a pas de pétrole, on a des idées »