Juste un poème n° 22

 

 



 

Instants n° 7

 

 


Sebastian D. Amigorena

25/03/2017 


 

 

La pente, le tracé et la topologie du fond de leur lit (qui peut causer des turbulences), déterminent pour parts inégales la vitesse du courant des cours d’eau. A son tour, cette vitesse, ainsi que la densité de l’eau, dictent les mutations que l’érosion cause au sable, à la terre, à la roche. Ces transformations sont régies par des lois physiques complexes, mais qu’il serait en principe, possible d’établir. On pourrait ainsi représenter les changements par des équations et les prédire de manière précise.

Qu’il est triste, pourtant, de penser combien dans la rivière d’Akusa, les fossés et les bancs de sable sont changeants et éphémères.

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Comment expliquer que la vue d’une fleur de pêcher, d’un lever de lune ou d’un pré chatouillé par le vent puisse nous émouvoir ? Comme si la beauté de la nature était quelque chose que nous partagions avec notre passé d’animaux sauvages. Je me souviens d’un jour étrange où, installé avec quelques amis à la terrasse d’un hôtel déliquescent sur les rives d’un lac en Inde, nous nous apprêtions à admirer le coucher du soleil. Un groupe de cinq ou six grands singes s’installa derrière nous, sur une branche d’arbre qui surplombait notre point de vue. Patiemment, le temps que notre vieille terre daigne tourner d’une dizaine de degrés, nous partageâmes avec ces animaux intimes un moment de silence. Avons-nous ressenti la même émotion ? Difficile à dire. Je ne doute pas, par contre, que nous n’ayons partagé la même fascination.

L’émotion que l’on peut éprouver devant une représentation réussie des mêmes objets naturels est un mystère tout aussi intrigant. Loin de la complexité des spectacles de la nature, un simple trait de crayon, quelques mots dans un ordre surprenant, suffissent parfois. N’est-ce pas alors la découverte de l’émotion d’un autre qui nous fascine ?

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Des arbres étonnés regardent par une fenêtre entre-ouverte, qui laisse aussi entrer un peu d’air froid et les rayons du soleil. Le dessin que fait l’ombre des carreaux sur le sol se déplace lentement au cours de la journée, puis disparaît. Une fine toile d’araignée pend du plafond. Sur le vieux parquet de bois, mes pas craquent et crissent. Je ne fais que passer.

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Du crépuscule à l’aube, la nuit a des contours de feu, mélanges de lumière et de pénombre, de violence et de quiétude. Ces bordures définissent une zone d’ombre-sombre qui tourne autour de la terre avec une lenteur silencieuse. Avec elle, tournent les soupirs de la nuit, ses rires et ses peurs, ses espoirs et ses cauchemars. Au-dessus des vallées et des montagnes, des villes et des prés, au-dessus de la mer, des orages et des éclairs, passe le brouillard noir-mouvant, imposant son règne profond et cyclique. Appartiennent à la nuit le plaisir et l’oubli, la douceur et la douleur, la vie et la mort. L’amour est du jour.

 

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Science et poésie sont les deux faces d’un miroir unique, qui reflète à la fois âmes et atomes, et dans lequel nous contemplons fascinés nos propres yeux. La science reflète nos yeux brillants, la poésie nos yeux humides.