Exergue n° 67

 

 

« Le rêve, ce n'est plus du tout sexe-était autrefois. Ça a beaucoup changé durant ces dernières années. Comme tant d'autres choses, faut bien le reconnaître. La cause ? Eh bien, primo, la vulgarisation de la psychanalyse (la psychologie qui fait pschtt) : on est prévenu. Et puis, secundo, l'influence du cinéma. Avant la découverte de l'écran, on se demande sur quel plan les gens pouvaient bien situer leurs rêves… sans écran… tout plat… tout lisse… Et quand les mouvizes seront en relief… alors… que de conséquences… »

Raymond Queneau, Monuments, XI,
dans Œuvres complètes 1, Paris, Gallimard, 1989, p. 192.

 
 



Dionys Del Planey

16/02/2013

- L'espace transitionnel est menacé par les mouvizes, par la pschtt-chanalyse. On observe une transition vers le pire, et aujourd'hui arrive le cinéma en trois dimensions, qui va encore plus saccager nos rêves. Mais il faut résister, conserver notre espace contre toutes ces viles attaques ennemies. Ne surtout pas inventer de nouveaux gadgets. Un flingue, un émetteur, c'est assez pour James Bond. Le cinéma, les tomates et les concombres, et même le rap, (pourtant si récent !) : tout était mieux avant.

- ... ?

 Queneau, caricaturant une opinion répandue dans un style digne de Flaubert et de son dictionnaire des idées reçues avait anticipé les plaintes d'aujourd'hui à propos du cinéma en trois dimensions qui, dit-on, n'a pas d'avenir. Il parodie à merveille une manière de s'inscrire dans les transitions non pas comme acteur, mais comme spectateur, passif mais bavard, inactif mais mécontent.

Pour moi, Transitions, c'est tout l'inverse. C'est une manière de commenter, mais en commentant la transition, de la fabriquer. Fabriquer des rêves, les faire transiter, sans perdre de vue que nul n'a le droit de décréter sexe-ils seront plus tard.