Abécédaire
Hélène Merlin-Kajman
11/03/2017
Comme la manifestation, le manifeste manifeste.
La première nous est familière. Pas le second.
Pourtant (même si l’histoire de la langue dément un peu cette intuition), je dirais que le manifeste proclame ce qui anime et propulse la manifestation.
Il le fait avec excès, il asserte avec emphase : certes ! Mais il le fait.
Le manifeste est excusable, nécessaire même, quand une grande colère généreuse le soulève, quand un frémissement d’allégresse le parcourt – ou quand il se pense comme « manifeste de moins » (voyez le nôtre).
On observe depuis quelques années un évident retour du désir de manifeste (voyez le comité invisible par exemple) en même temps qu’un changement de style de la manifestation.
La « manif pour tous », qui fait ressurgir le sens religieux de « manifeste », vérifie cette tendance sous la forme d'une caricature volontairement provocatrice.
Mais la provocation est son affaire : pas la nôtre.
Face à elle, malgré le sombre monde, voyez les éclats d’espérance un peu partout : de petits manifestes en pagaille joyeuse !
Les rassembler sans faire un manifeste de trop, colosse aux pieds d’argile – tel est le défi - n’est-ce pas ?